Par Geneviève Dionne
Conseillère principale, écoconception, Éco Entreprises Québec
En alimentation, plusieurs motifs poussent les entreprises à optimiser leurs emballages : les impératifs de la chaîne d’approvisionnement, la demande croissante pour une meilleure traçabilité des produits – du champ à l’assiette, l’évolution technologique dans la conservation et la préservation des aliments et les nouvelles habitudes de consommation, telles que le prêt-à-manger et les collations sur le pouce, par exemple. De plus, la lutte au gaspillage alimentaire jumelée au mouvement « zéro déchet » incite également les entreprises à miser sur des emballages écoresponsables dans le but de réduire leur empreinte environnementale.
Au cours de la dernière année, Éco -Entreprises Québec (ÉEQ) a eu le plaisir d’accompagner une vingtaine d’entreprises dans leurs démarches d’écoconception d’emballages. Ainsi, en cherchant à privilégier des emballages à la fois plus performants et écoresponsables, et à communiquer les bénéfices à leurs clients, ces entreprises ont saisi cette opportunité de positionnement dans leurs marchés respectifs. En somme, la plupart s’entendent pour dire que les bénéfices sont nombreux, en retour d’efforts beaucoup moins élevés qu’il n’y paraissait de prime abord.
Nos services d’accompagnement des entreprises reposent à la fois sur notre expertise en écoconception ainsi que sur la collaboration de l’équipe du Groupe AGÉCO, une firme spécialisée dans le conseil -stratégique en matière de responsabilité sociale et -environnementale.
J’ai posé quelques questions à son vice–président, Édouard Clément, pour qu’il partage avec nous les défis et les succès du parcours de la vingtaine d’entreprises qu’il a accompagnées pour notre compte au cours de la dernière année.
Geneviève Dionne : Il y a un véritable momentum par rapport à l’intérêt des entreprises agroalimentaires envers les emballages écoconçus. Il y a certainement plusieurs raisons qui expliquent cet engouement. Quelle est la principale, selon vous ?
Édouard Clément : J’y vois une maturité grandissante des entreprises, qui pensent au-delà du produit et comprennent la nécessité d’adopter des pratiques écoresponsables, même pour le développement d’emballages. Il est vrai qu’elles sentent une certaine pression que je qualifierais de « positive » : d’une part, des consommateurs qui considèrent de plus en plus les attributs écoresponsables des -emballages comme des critères de sélection et de fidélisation à une marque, et d’autre part, les exigences des détaillants envers leurs fournisseurs de privilégier des emballages à plus faible impact sur l’environnement.
GD : Parmi les nombreux bénéfices associés à l’écoconception d’emballages dans le secteur agroalimentaire, lequel est le plus recherché par les entreprises qui font cette démarche ?
EC : En fait, il y a une foule de retombées ! D’abord, il y a évidemment l’avantage concurrentiel que ceci procure. Des sondages récents effectués auprès de consommateurs démontrent qu’à prix égal, ils favorisent les produits emballés de manière écoresponsable 1.
Il n’y a pas longtemps, au chapitre de l’emballage, on mettait davantage les efforts dans le design visuel. Mais aujourd’hui, lorsque les consommateurs prennent conscience que l’emballage et le produit ont été conçus de manière écoresponsable, ils y voient assurément un élément supplémentaire pour nourrir leur capital de sympathie envers cette marque. Il importe donc de communiquer la démarche sur l’emballage, puisque celui-ci constitue le premier « porte-parole » d’une marque ou d’un produit.
GD : J’aimerais vous entendre sur les -principaux freins qui font hésiter certaines entreprises à passer à l’action.
EC : À mon avis, les entreprises voient parfois la démarche comme plus complexe qu’elle ne l’est en réalité ! Contrairement à ce que l’on peut penser, on n’a pas besoin d’une pléthore d’experts ou de ressources internes additionnelles. Les ressources et outils sont disponibles et accessibles. Et les bénéfices – mesurables – ils se font sentir à brève échéance. De plus, lorsqu’on réalise qu’il s’agit d’un projet ayant des retombées concrètes d’améliorations environnementales alliées à des économies, cela devient souvent une priorité organisationnelle.
GD : L’écoconception génère justement des bénéfices économiques. Or, certaines -entreprises invoquent parfois des restrictions budgétaires comme raison pour ne pas emboîter le pas. Devrait-on mettre davantage l’accent sur l’argument économique ?
EC : L’argument économique, c’est une excellente raison d’aller de l’avant, non pas une excuse pour attendre à plus tard. À la base, l’écoconception d’emballages, c’est un exercice d’optimisation qui permet de mieux utiliser les ressources et d’éviter toute forme de gaspillage. Qui dit meilleure utilisation, dit réduction potentielle de coûts et, dans ce cas-ci, les gains économiques sont nombreux : réduction des coûts d’achat des matières -premières, réduction de la masse ou de volume entrainant de plus faibles coûts de manutention et de transport ainsi que pour la gestion des emballages en fin de vie par la filière du recyclage. L’optimisation permet donc de faire des économies sur toutes les composantes du cycle de vie de l’emballage, en plus des bénéfices environnementaux, comme la réduction des gaz à effet de serre (GES).
Notons au passage que les entreprises qui mettent sur le marché québécois des -contenants, des emballages et des imprimés sont financièrement responsables de compenser les coûts des services municipaux de collecte sélective. Un autre levier financier pour passer à l’action !
GD : Un élément que je trouve particulièrement intéressant, c’est le fait qu’il y a aussi des bénéfices en termes de dynamique de travail au sein de l’entreprise.
EC : C’est souvent une surprise très positive pour les entreprises : ça aide à briser les silos ! La démarche d’écoconception d’emballages doit se faire en mode « projet » et impliquer les différents départements de l’entreprise : approvisionnement et achats, production et opérations, finances, marketing et communications. Aux yeux des dirigeants à qui je parle, c’est un énorme atout puisque cela devient un projet concret et rassembleur de responsabilité d’entreprise. D’ailleurs, il est intéressant de noter que de plus en plus d’entreprises mettent sur pied des équipes qui regroupent des employés de différents départements pour le développement de produits et d’emballages. Ça encourage la recherche d’innovations !
GD : Quel est le rôle de l’entreprise dans le processus lorsqu’elle est accompagnée par un expert externe ?
EC : Notre rôle, c’est d’être des facilitateurs. Après une séance d’initiation à la démarche d’écoconception de deux à trois heures, les entreprises sont habituellement prêtes à débuter un projet concret, car elles auront déjà entre les mains les renseignements et les outils pour passer à l’action. En tant qu’accompagnateur, nous demeurons pertinents d’un bout à l’autre du processus, mais il y a aussi une grande appropriation qui se fait naturellement au sein de l’entreprise.
Pour en savoir davantage, sur l’écoconception des emballages rendez-vous sur le site
OptimEco.ca ou contactez-nous à l’adresse
suivante : optimeco@ecoentreprises.qc.ca
1 Baromètre de l’Observatoire de la consommation responsable, les Québécois et les emballages écoresponsables, 2014